TheseMarouan

From Pirate Party Belgium
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Introduction

  • Parce qu'il fallait bien qu'un jour quelqu'un s'y colle, j'ai décidé d'écrire sur le Parti Pirate.
  • J'ai longtemps hésité avant d'entreprendre ce travail, pour plusieurs raisons :
    • d'abord parce que je suis "la tête dans le guidon" : depuis la création du parti en juin 2009, le projet Pirate occupe une place importante dans ma vie. Développer le projet et empêcher qu'il ne sombre prend tout mon temps disponible.
    • ensuite parce que ce projet est si intimement lié à ma vie que j'ai longtemps pensé que je n'avais pas l'objectivité nécessaire pour en parler. Mais en fait il n'en est rien : j'ai entendu bien trop de sottises, assénées sur un ton péremptoire, pour ne pas me dire que finalement mon point de vue vaut bien celui d'un autre.
    • enfin parce qu'il fallait y réfléchir : cette aventure touche à trop de fondamentaux, les changements qu'elle impose sont trop profonds. Pour "lire" ce qui se passe, il faut une "paire de lunettes", une "grille de lecture" qu'il faut concevoir d'abord, fabriquer ensuite et enfin appliquer. Et ce, grâce à la sociologie.
  • Car, oui, l'angle par lequel est je compte aborder ce bazar est la sociologie.
  • "La sociologie est un sport de combat", disait Pierre Bourdieu. Pour ma part, je dirais plus que c'est un outil. Un puissant outil permettant de relier les faits entre eux et, au final, de lire le monde.

Une histoire du Parti Pirate de Belgique

Tout a commencé au soir des élections régionales et européennes du 7 juin 2009. La soirée électorale avait été des plus moroses : à Bruxelles, la majorité en place allait être reconduite, malgré son bilan et malgré que les parties qui la constituaient étaient les acteurs de la plus grande (et ridicule) crise politique que la Belgique ait jamais connue.

Du côté des élections européennes, en revanche, une minuscule info aurait attiré l'attention de n'importe quel amateur de la chose politique : un suédois, Christian Engstöm, devenait MEP sous la curieuse bannière du Parti Pirate.

A l'époque, Jurgen Rateau et moi étions en train de plancher sur la suite de l'aventure [paranoïaque].

Parano.be est un site communautaire, ce qu'on appelle aujourd'hui un réseau social. A sa création, en 2003, ce site ne devait être qu'un "bac à sable", le lieu des expérimentations programmatiques du codeur du site. Mais très vite, le site s'est révélé être une expérience de vie unique pour ses utilisateurs : une dynamique particulière entre les personnes se mettaient en place. Et cette dynamique produisait quelque chose qui affectait directement les gens. La production du contenu des "Propagandes", les relations "inter-sectorielles", les "visus", tout cela mettait en lumière quelque chose, une nouvelle manière de faire des trucs, un quelque chose qui a été longtemps inexprimé, en grande partie parce que c'était totalement et réellement nouveau.

L'aventure [paranoïaque] a elle seule mériterait une histoire mais c'est celle du Parti Pirate que je raconte.

Jurgen et moi, donc, anciens [paranoïaques], étions, au début de l'année 2009, en train de cogiter/discuter/travailler sur ce que nous pouvions faire. Nous avions même appelés ce projet "XXIe" et voici un exemple des échanges que nous avions, en décembre 2008 :

Jurgen, 27/12/2008 : Si on part du postulat que l'État-Nation est mort et que la scène politique n'est plus qu'un grand théâtre sans pouvoir réel (des pantins quoi) et que c'est bien les réseaux, lobbies et autres entreprises qui définissent ce qui se fait et ce qui ne se fait pas alors est-ce qu'on ne ferait pas mieux de plutôt créer un réseau d'influence, une structure qui répond à un nombre de besoins et qui crée des affinités ? Ou d'essayer de s'établir sur ces axes différents ? Plus que j'y pense plus que j'en ai le tournis, comment trouver le point d'entrée dans tout ce bric à brac ?*

Marouan, 30/12/2008 : Effectivement, c'est vertigineux, et en ça Jan et Alex ne sont pas des gurus mais des véritables explorateurs, des précurseurs qui ont de très bonnes intuitions (très bonnes parce qu'elles correspondent au réel ou à un réel). Et je suis heureux de voir que la lecture de ce livre te fait le même effet qu'à moi. Ces intuitions, à nous, présent et à venir, de les formaliser. L'invention est perpétuelle. En fait, ce que nous sommes en train de faire là, c'est inventer une nouvelle manière de faire de la politique, quelque chose qui aillent au-delà des deux formes connues, la démocratie représentative et la démocratie participative.

Autrement dit, le projet Pirate tel qu'il était formulé sur le site suédois en juin 2009 rencontrait parfaitement nos préoccupations de l'époque. Alors nous le fîmes : lancer le Parti Pirate de Belgique.

Pendant toute l'été, ce ne fut que conversation et supputation : comment faire concrètement pour créer un parti en Belgique ? Des contacts de ci, de là. Et notre premier contact avec l'international Pirate : un jeune suédois de 18 ans qui, venant d'un village du nord de la Suède en roller, s'était mis en tête de montrer le caractère inaccessible des institutions européennes. (Ce qui fut fait, puisqu'il est arrivé de son long périple un week-end et qu'il a trouvé le parlement portes closes)

Mais l'aventure démarra réellement lorsque, en septembre, une autre ancienne [paranoïaque] nous rejoint dans l'aventure. Ce faisant, Monika Kornacka a posée deux jalons qui demeurent essentiels pour les Pirates :

  1. il faut être trois pirates pour que quelque chose se fassent ;
  2. si tu veux que ça marche, le trio doit être mixte.

S'ensuivirent quelques semaines de travail pour la création du binôme "association de fait - association sans but lucratifs", l'ouverture des comptes bancaires, l'installation du site internet et les premières "PirateBeer".

Au premier trimestre 2010, nous avons été en charge, Belgique oblige, de l'organisation de la première réunion, à Bruxelles, du PPI, qui est la coordination internationale des Partis Pirate à travers le monde.

Et, en mai 2010, nous décidons de participer aux élections législatives anticipées du 10 juin 2010. L'affaire était mal emmanchée dès le départ : la date de ces élections avaient été annoncée très tardivement (il fallait retourner aux urnes avant les vacances), nous ne disposions pas du nombre de signatures suffisant et nous étions tout au plus une dizaine de personnes. Mais nous sommes tout de même parvenus à obtenir le nombre requis de signature dans l'arrondissement électoral de Bruxelles ; à élaborer une liste (minimale) de "vrais" candidats. ; et même, à présenter un programme en 42 points.

C'est là que le bât a blessé.

Depuis le premier jour, le champ d'action du projet Pirate s'est expressément limité aux trois priorités politiques que sont la réforme du droit d'auteur, la suppression des brevets sur le logiciel et sur le vivant et le renforcement de la vie privée des citoyens. A l'orthodoxie Pirate (only these three issues') s'opposaient (et s'opposent encore) ceux qui, comme moi, pensent que ces priorités politiques ne sont pas limitatifs et constituent la trame d’une Weltanschauung, une certaine conception du monde porteuse d’un projet de société.

Le programme électoral de juin 2010 du Parti Pirate était trop technophile : en se limitant à défendre le "droit des internautes" (pour reprendre l'expression des Pirates français), le Parti n'en était pas un, tout au plus un groupe de pression. Je pris donc mes distances avec l'équipe de l'époque, bien que je fis campagne, étant moi même candidat.

Le score de la liste fut honorable (2,26% dans la plus grande circonscription du pays), considérant le temps et les moyens disponibles.

Et parce que je n'étais pas d'accord avec la ligne politique choisie par l'équipe de l'époque et aussi parce que ma vie personnelle connaissait certaines turbulences, je pris mes distances avec le Parti, bien que je fis campagne et que je palliai régulièrement aux absences de l'un ou l'autre membre de l'équipe.

Puis vint le printemps arabe, en janvier 2011.

Là aussi, cette histoire mériterait d'être racontée par le menu, tant elle a à voir avec ce qui nous occupe. J'y reviendrai.

En 2011, je passe six mois au Maroc, durant lesquels je n'ai eu de cesse d'essayer de démarrer, avec tant d'autres, le projet Pirate là-bas. Le point commun entre la version belge et la version marocaine du projet Pirate n'est pas seulement ma bête personne. Mais de ça aussi, il faudra parler plus longuement, ailleurs dans ce texte.

En février 2012, retour en Belgique et préparation de l'Assemblée Générale du 25 mars, durant laquelle une nouvelle "Coreteam" a été élue. De ce moment, plusieurs leçons ont émergées :

  1. il ne sert à rien à de soumettre an AG un texte à la rédaction duquel personne n'a participé : le Fucking Manual, document reprenant le mode de fonctionnement du Parti, a été rejeté. Non pas à cause de sa qualité (le texte ne faisait que reprendre le mode de fonctionnement appliquée depuis le lancement du parti), mais à cause du way to make it : les personnes présentes à l'AG n'ont pas consenti à adopter le texte parce qu'ils n'ont pas travaillé dessus. Le document n'était pas légitime, pas sur le fond mais sur la forme.
  2. la distribution de la parole est essentielle.